“Blanquergate” : après les révélations de Mediapart et Libération, jusqu’où ira ce gouvernement ?

Des informations diffusées par Mediapart et Libération, relatives au financement et au fonctionnement du pseudo-syndicat « Avenir Lycéen », révèlent que le ministère, aidé par des hauts fonctionnaires des rectorats, a piloté et mis en scène la création d’une organisation lycéenne. Cette organisation a été généreusement “arrosée” d’argent public (95 000€ en deux ans) par le biais de subventions destinées à financer des projets liés à la “vie lycéenne”, donc d’intérêt public. Cet argent aura essentiellement été dépensé en matériel informatique, bouteilles de champagne, restaurants et chambres d’hôtel à 300 euros.

L’objectif était de court-circuiter les organisations lycéennes coupables d’être critiques vis à vis de la politique de M. Blanquer. Il s’agissait de feindre un pseudo dialogue social avec les lycéen.ne.s, en écartant les véritables interlocuteurs-trices.

Une de Libération du 21 novembre 2020

Rappelons également que selon le quotidien Libération, le Rectorat de Créteil est directement mis en cause. Il est écrit qu’en décembre 2018, le Rectorat aurait imposé un communiqué aux élu-e-s du CAVL de l’académie de Créteil, alors que les lycéen.nes.s luttaient contre la mise en place de Parcoursup, des réformes des lycées et du baccalauréat par des blocus notamment.

Il s’agit des mêmes méthodes que les franges les plus autoritaires et antisyndicales du patronat qui créent leurs “syndicats maison” afin d’étouffer toute revendication. Dans le même mouvement, M. Blanquer n’a eu de cesse de tenter de briser le paritarisme qui organisait un dialogue intense entre représentants syndicaux et administration, garantissant une mobilisation et un contrôle des personnels sur des aspects essentiels de leur vie professionnelle.

Depuis trois années, les lycéen.n.e.s, les étudiant.e.s , les enseignant.e.s et les parents s’opposent à la politique éducative et aux réformes de M. Blanquer. Le ministre a été régulièrement mis en minorité au Conseil Supérieur de l’Education, comme sur la loi Blanquer par exemple, ou récemment mis en cause par une tribune publique de hauts fonctionnaires de l’éducation nationale, fait totalement inédit. Il est de plus en plus illégitime aux yeux d’un grand nombre d’acteurs de la communauté éducative. Le ministre n’en a cure et passe en force. A chaque fois.

A cela viennent s’ajouter les errements et l’incompétence dans la gestion de la situation sanitaire, où le ministère a multiplié les effets d’annonces médiatiques alors que sur le terrain régnaient l’impréparation, l’absence d’anticipation et la confusion, mettant en danger élèves, familles et personnels. Et n’oublions le fiasco de la préparation de l’hommage à notre collègue Samuel Paty.

Plutôt que de s’expliquer, le ministre nie toute « affaire », s’enferre dans son scandale et perd pied. Il s’est récemment réfugié, lundi 23 novembre 2020, dans des mises en cause tous azimuts en direct sur BFM contre « des médias, en l’occurrence tout un secteur de l’ultra-gauche » (comprendre Médiapart et Libération !) ainsi que contre de véritables organisations syndicales « totalement liées à des partis d’extrême-gauche » (à une question posée à propos de l’UNL, du MNL et du SNES-FSU, syndicat largement majoritaire des personnels du second degré). Tout cela vient quelques semaines après avoir dénoncé « les ravages de l’islamo-gauchisme » dans les milieux de recherche et s’être ainsi attiré les foudres de la très mesurée Conférence des Présidents d’Universités…

Outre le ridicule fini de toutes ces accusations, on voit ici que le ministre sombre dans l’obsession et le complotisme, en révélant sa vision des organisations syndicales et des représentants des personnels qui ont le malheur de défendre le service public, perçus comme une sorte de “cancer ultra-gauche” agissant sur le corps enseignant. Il oublie ou feint d’oublier que les représentants du personnel tirent leur légitimité du vote démocratique des personnels et de leur action au quotidien.

Ces attaques indignes sont le signe d’un mépris de la démocratie, des instances de dialogue social et des personnels eux-mêmes. A l’illégitimité et l’incompétence d’un ministre de l’Education Nationale en roue libre, s’ajoutent désormais de forts soupçons d’illégalité et de pratiques d’escroquerie en bande ministérielle organisée…

Caricature d’Allan Barte du 21 novembre 2020

Enfin, revenons sur la super-promotion de notre rectrice, Anne Laude, qui vient d’être nommée Conseillère Education du Président de la République. Jusqu’à dimanche, celle-ci faisait partie des abonné.e.s Twitter d’Avenir Lycéen. Aujourd’hui, celle-ci ne semble plus adhérer aux idées de ce “syndicat”… Hasard ou coïncidence ?

Capture d’écran des abonnés au compte Twitter d’Avenir Lycéen le 22 novembre 2020

Rappelons que ce gouvernement avait comme ambition de “rompre avec l’Ancien Monde et ses vieux agissements dans le monde politique”, promouvait la “nouveauté”. Peine perdue : ce monde se montre toujours aussi nébuleux de par son jeu de chaises musicales, cooptations et petits arrangements entre amis.

A ce titre-là et par conséquent, ce sont toutes les personnes qui sont mêlées à ce “Blanquer Gate” qui doivent ENFIN prendre leur responsabilités et… partir. La liste est longue en effet : ministre de l’EN, DGESCO, recteurs, premier ministre, président de République… Ne soyons pas naïfs, ceci n’est pas “l’œuvre” d’un seul homme !

Le SNUipp-FSU 87 exige que toute la lumière
soit faite sur ces agissements et que les personnes concernées aient à s’expliquer.

Le SNUipp-FSU 87 exige que les (ir)responsables politiques
soient sanctionnés à la hauteur des faits.