
Direction d’école : nul besoin de cette proposition de loi, nul besoin d’emploi fonctionnel pour répondre aux revendications des personnels !
Une proposition de loi parlementaire, sans doute soutenue par le ministère, sur la direction d’école sera étudiée par l’Assemblée nationale le 22 juin prochain. Un texte qui laisse croire à quelques avancées par ailleurs imprécises mais esquisse surtout une caporalisation de la fonction déguisée sous la formulation « d’emploi fonctionnel ». Une pétition en ligne est proposée pour rappeler qu’il n’est nul besoin « d’emploi fonctionnel » pour répondre aux revendications des personnels.
Les organisations syndicales CGT-Educ’action, SNUipp-FSU, Sud-éducation et SNUDI-FO lancent une pétition en ligne pour rappeler qu’il n’est nul besoin d’une loi ou d’emploi fonctionnel pour répondre aux revendications des personnels.
JE SIGNE LA PÉTITION EN LIGNE
Le SNUipp-FSU a publié un 4 pages qui permet d’appréhender avec tous les éléments nécessaires à la réflexion la proposition de loi Rilhac de LREM sur la création de la “Fonction” de direction pour les collègues en charge de la direction d’école.
Un courrier à destination des député.e.s et séna.teur.trice.s a été fait sur la base des éléments de réflexion développés ci-après.
Une proposition de loi « créant la fonction de directeur d’école » est mise en discussion à l’Assemblée nationale ce mois-ci. Elle s’inscrit dans la continuité d’autres projets et propositions de loi sur la direction d’école qui ont été rejetés par la communauté éducative, comme par les parlementaires, ces dernières années.
Par leur action de coordination et d’animation, les directeurs et directrices d’école jouent un rôle essentiel dans le bon fonctionnement de l’École, malgré des conditions d’exercice dégradées depuis de nombreuses années. Ils et elles sont au cœur des interactions de l’école et sont des interlocuteurs.trices identifié.es par les partenaires : familles, élu.es, professionnel.les du domaine du soin, associations… Cela s’est particulièrement vérifié dans la période actuelle où les directions d’école sont fortement sollicitées, même au-delà de leurs missions propres.
Dans un contexte exceptionnel, les directeurs et directrices d’école ont en effet tout mis en œuvre, avec les équipes enseignantes, pour maintenir le lien avec les élèves et les familles durant la période de confinement, puis pour organiser le retour des élèves à l’école dans le respect du protocole sanitaire.
Ce travail important a mis en exergue la nécessité du cadre collectif de l’école, reposant sur l’investissement des enseignant.es, adjoint.es comme celle ou celui en charge de la direction.
Les directeurs et directrices n’ont cessé depuis de nombreuses années, avec notre organisation syndicale, d’exprimer leur besoin de reconnaissance, issu d’un décalage entre leur investissement professionnel au service de l’École et le manque de soutien et de moyens accordés par l’institution.
En début d’année scolaire, le SNUipp-FSU a porté quinze mesures d’urgence à mettre en œuvre pour la direction d’école. Dans le même temps, suite au suicide de Christine Renon, directrice, sur son lieu de travail, le ministère de l’Education Nationale a lancé une consultation qui confirme les revendications de la profession et ouvert un cycle de concertations avec les représentants des personnels. Les résultats de cette enquête ont tracé une feuille de route pour répondre aux préoccupations des directeurs et directrices et constituent un point d’appui pour poursuivre la concertation avec les organisations syndicales.
La pandémie a interrompu les travaux et aucune mesure concrète, pour la rentrée de septembre, n’a été avancée à ce jour pour améliorer les conditions de travail des directeurs et directrices. Or, la période actuelle accentue une urgence déjà bien présente La proposition de loi vient non seulement percuter l’agenda social, mais bousculer profondément le fonctionnement de l’École. Sous couvert d’apporter des réponses à de légitimes revendications portées par les personnels, elle utilise des termes lourds de conséquences, non déclinés dans le texte. Ceux-ci seraient précisés ultérieurement par un cadre réglementaire que nous ne connaissons encore pas, laissant ainsi place à de multiples ambiguïtés et interprétations.
Alors que la profession a refusé toute autorité hiérarchique dans les écoles lors de l’examen de la Loi de l’Ecole de la confiance, le texte introduit une « délégation de l’autorité académique » en affirmant que le.la directeur.trice aura autorité sur les personnels. Cela définit un tout nouveau cadre d’exercice de la fonction de direction la détachant du collectif de travail pour l’inscrire implicitement dans la chaîne hiérarchique.
La création d’un emploi fonctionnel de directeur soulève, de la même manière, de nombreuses interrogations. Les « emplois fonctionnels », dans la Fonction publique, sont des postes à responsabilités sur lesquels les personnels sont nommé.es pour une durée déterminée, éventuellement renouvelable et soumis.es à une obligation de mobilité. Un « emploi fonctionnel » se définit aussi par ses modalités de recrutement, ses missions et, ses conditions d’accès…, laissées à l’appréciation des DASEN et des situations locales. Est-ce une réponse aux préoccupations des directeurs et directrices, souvent attaché.es à leur école et à leur territoire ?
Ces évolutions tendent vers plus d’instabilité et ne sécurisent pas la fonction. Elles généreront au contraire de nouvelles pressions et missions, à l’opposé de ce que demande la majorité des directeurs et directrices. De plus, les « délégation de l’autorité académique » et « emploi fonctionnel » pourraient leur être retirés par l’autorité hiérarchique, instaurant ainsi une précarité de carrière pour les personnels et de stabilité pour les écoles.
Une autre source d’instabilité est introduite par l’éventuelle mise à disposition d’une aide humaine, laissée à la discrétion des communes, tant sur la fonction que sur les modalités de recrutement et de formation. Ces mesures sont-elles de nature à améliorer le fonctionnement de l’école et la réussite des élèves ?
La reconnaissance tant attendue doit passer, avant tout, par des mesures concrètes : augmenter significativement le temps de décharge sans mission supplémentaire pour toutes les écoles, sans aucune direction en deçà d’un ¼ de décharge ; créer une aide pérenne à la direction et au fonctionnement de l’école par la création d’emplois statutaires à temps plein sur tout le territoire ; développer une formation initiale et continue régulière de qualité sur le temps de travail pour apporter les connaissances et savoir-faire nécessaires.
Un allègement des tâches et une meilleure définition des missions doivent permettre aux directeurs et directrices de se recentrer sur ce qui fait le cœur de leur métier : animer et coordonner, favoriser la mise en œuvre des projets pédagogiques décidés par l’équipe enseignante, suivre les élèves pour contribuer à leurs réussites et développer le lien avec les familles…
Des évolutions sont certes indispensables pour améliorer significativement les conditions de travail des directeurs et directrices d’école. Il ne peut y avoir de statu quo mais cette proposition de loi n’est pas la réponse aux problématiques soulevées car elle fait peser sur le fonctionnement de l’École de trop nombreuses inquiétudes. Si l’originalité de l’école primaire française est souvent soulignée, sa spécificité ne doit pas servir à justifier des réformes conduisant à l’aligner sur le 2nd degré ou d’autres pays.
Pour le SNUipp-FSU, la richesse du primaire place le collectif de travail au cœur du fonctionnement démocratique de l’école, incarné par le conseil des maitres.ses, coordonné par un.e directeur.trice, pair.e parmi ses pair.es.